Manuel des tunnels routiers
L'impact des infrastructures routières sur la qualité de l'eau peut être très significatif à la fois pendant l'exploitation normale (fuites d'hydrocarbures, usure des pneumatiques...) et en situation accidentelle (déversement de grandes quantités de polluants).
L’existence d’un tunnel modifie peu ce problème. Comme pour toute route, le besoin de traitement des eaux existe (décantation, élimination des polluants) avant le rejet dans le milieu naturel. Quelques éléments spécifiques aux tunnels doivent cependant être pris en compte lors de la conception des systèmes de traitement des eaux. Premièrement, les tunnels doivent être nettoyés régulièrement, jusqu’à une fois par mois pour des tunnels urbains à fort trafic. Cela génère d’importants volumes d’eaux usées contenant des produits de nettoyage. En outre, les tunnels autorisés aux véhicules transportant des marchandises dangereuses sont généralement équipés de caniveaux spécifiques afin de limiter l’épandage de liquides inflammables sur la chaussée. Si un déversement accidentel se produit, le débit de liquide pollué dans ces caniveaux peut être supérieur à ceux rencontrés sur une chaussée routière ordinaire, et le système de traitement des eaux doit être capable de faire face à de tels débits.
Des problèmes très sérieux en lien avec l’eau peuvent être rencontrés durant la phase de construction d’un tunnel, par exemple en ce qui concerne la turbidité des effluents du chantier. Des mesures appropriées doivent alors être prises. Dans certains cas, elles représentent des contraintes et des coûts significatifs pour le chantier. La construction des tunnels et les problèmes associés n’entrent pas dans le champ de compétence du comité PIARC sur l’exploitation des tunnels. Le lecteur se reportera utilement aux recommandations de l’AITES pour de plus amples informations.
L’impact hydrologique est également un aspect à analyser durant le cycle de vie d’un tunnel.
La plupart des impacts sur l’eau des tunnels (et de l’eau sur les tunnel) se produisent lors de la construction, mais certains d’entre eux persistent à plus long terme et peuvent devenir une gêne à l’exploitation et à l’entretien du tunnel. Une attention suffisante doit être prêtée à ces aspects durant les phases de conception de l’ouvrage, afin d’éviter des conséquences néfastes et coûteuses. L’étude détaillée de l’hydrologie de surface et souterraine avant et pendant la construction doit être effectuée. Afin de réduire les impacts, le tracé et le type de structure minimisant les impacts doivent être choisis de manière à éviter que le tunnel vienne constituer un obstacle altérant l’écoulement naturel des eaux du massif.
En théorie, les tunnels peuvent être imperméables (aucune infiltration d'eau, pression hydraulique complète sur le revêtement) ou (semi-)perméables (permettant un certain volume d'infiltration afin d’éviter une trop forte pression sur le revêtement). En pratique, la plupart des tunnels sont perméables pendant leur construction et imperméables ou semi-perméables pendant leur exploitation. En règle générale, l'infiltration d'eau dans les tunnels routiers n'est pas acceptée car elle peut avoir un impact important sur la structure du tunnel et, dans des cas particuliers, provoquer de graves déformations, des déplacements, des tassements et des contraintes indésirables entraînant une détérioration et, dans le pire des cas, l'effondrement des parois et du plafond du tunnel (éclatement et écrasement de la roche nue également). Cela peut aussi avoir un impact sur la fonctionnalité et la durée de vie des installations électro-mécaniques et électriques.
Une infiltration d'eau est tolérée si elle peut être entièrement contrôlée. Cela concerne les tunnels situés dans des zones rurales spécifiques et à très faible trafic. Cela a été fait dans plusieurs tunnels entre 1970 et 2000. Au cours des dernières années, des tunnels creusés dans le rocher ont été construits avec un revêtement intérieur complet ou semi-complet en raison de l'expérience acquise lors de l'effondrement de tunnels, etc. En règle générale (voir les normes nationales et internationales, les réglementations, etc.), tous les tunnels sont aujourd'hui conçus avec des systèmes d'étanchéité totale.
La figure 1 montre l'infiltration d'eau dans un tunnel construit avec des voussoirs et conçu pour être totalement étanche
Dans les tunnels sans revêtement (ou avec un revêtement perméable), la pénétration de l'eau peut être importante. La figure 2 montre l'eau s'écoulant à travers une couche de basalte perméable, au Canada.
L'assèchement du niveau des eaux souterraines causé par la manière de construire les infrastructures est un sujet qui prend de plus en plus d'importance. L'effet, généralement pas limité à la phase de construction du tunnel, se poursuit durant la phase d’exploitation. Les niveaux d'origine des eaux souterraines baissent irréversiblement, avec un impact sur les puits d'approvisionnement en eau.
L'eau qui pénètre dans un tunnel peut dissoudre l'hydroxyde de calcium présent dans le revêtement en béton, devenant ainsi plus alcaline et provoquant des dépôts solides dans les systèmes de drainage. Cet effet est plus fréquent dans les vieux tunnels dont les systèmes de drainage sont devenus obsolètes. La figure 3 montre l'écoulement de l'eau de drainage et la précipitation des hydroxydes de calcium présents dans le béton d’un tunnel revêtu. La figure 4 montre un effet similaire dans un joint de construction.