Au cours des dernières années, divers approches et outils ont été élaborés pour permettre aux parties concernées d'avoir une vision et une compréhension communes de l'interaction des dispositifs et dispositions de sécurité d'un tunnel et de la manière dont le tunnel interagit avec son environnement. Ils devraient également aider à organiser efficacement les décisions et les actions nécessaires pour assurer un niveau de sécurité adéquat et constant tout au long de la durée de vie d'un tunnel. Ces approches et outils doivent permettre de traduire le niveau de sécurité actuel d'un tunnel afin d’apporter une aide à la décision sur le besoin d’évolution des dispositifs et dispositions impactant la sécurité du tunnel.
Le dossier de sécurité est un dossier rassemblant les caractéristiques et données actualisées d'un tunnel, qui offre une vue d'ensemble de tous les paramètres impactant la sécurité et de leur niveau actuel. L'évaluation des risques peut être utilisée pour une analyse approfondie et une quantification de ces paramètres, fournissant ainsi également des informations quantitatives sur l'efficacité des mesures spécifiques d'atténuation des risques pour un tunnel donné. Les outils d'évaluation des risques sont donc souvent utilisés pour justifier la nécessité de développer des mesures de sécurité supplémentaires ainsi que pour optimiser un ensemble cohérent de mesures, ce qui est particulièrement pertinent dans le cas de l'amélioration de la sécurité des tunnels existants. Pour les dangers causés par un déversement de marchandises dangereuses, des modèles de risques sont disponibles.
La connaissance de l'état actuel des systèmes de sécurité d'un tunnel s’ obtient par des inspections régulières du tunnel, tandis que l'apprentissage par retour d’expérience pratique peut être assuré par une collecte et une évaluation systématiques des données d'incidents réels. La réalisation régulière d’ exercices de sécurité et la formation des services d'intervention améliorent la préparation à la gestion des incidents qui ne peuvent jamais être totalement éliminés par les mesures préventives.
Outre l'approche normative traditionnelle, une approche fondée sur les risques - appelée analyse et évaluation des risques - peut être utilisée pour examiner les dispositions spécifiques relatives à la sécurité d'un système « tunnel » (comprenant les véhicules, les usagers, l'exploitation, l’infrastructure et ses systèmes de sécurité, les services de secours) et leur impact sur la sécurité.
Différents types de risques peuvent être abordés dans une approche fondée sur les risques, tels que les dommages causés à un groupe spécifique de personnes (risque sociétal) ou à un individu (risque individuel), la perte de biens, les dommages causés à l'environnement ou aux valeurs immatérielles. Généralement, les analyses de risque pour les tunnels routiers se concentrent sur le risque sociétal des usagers du tunnel, qui peut être exprimé sous la forme de l’espérance mathématique du nombre de décès annuel ou d'une courbe dans le diagramme FN montrant la relation entre la fréquence et les conséquences (en termes de nombre de décès) d'éventuels incidents dans les tunnels.
L'analyse et l’évaluation des risques est une approche systémique visant à analyser les séquences et les interrelations des incidents potentiels, ce qui permet d’identifier les points faibles du système et d’identifier les mesures d'amélioration possibles. Trois étapes caractérisent le processus d’analyse et d'évaluation des risques :
• Analyse des risques : L'analyse des risques porte sur la question fondamentale : "Que pourrait-il arriver et quelles sont les probabilités et les conséquences ? " Elle implique l'identification des dangers et l'estimation de la probabilité et des conséquences de chacun d’entre eux. L'analyse des risques peut être effectuée de manière qualitative ou quantitative ou en combinant les deux. Deux familles d'approches conviennent aux tunnels routiers :
- une approche basée sur les scénarios, qui analyse un ensemble défini de scénarios pertinents, avec une analyse séparée pour chacun d'entre eux,
- une approche systémique, qui étudie un système global dans un processus intégré, incluant tous les scénarios pertinents influençant le risque du tunnel, produisant ainsi des indicateurs de risque pour l'ensemble du système.
Pour les analyses de risques systémiques, les méthodes quantitatives sont une pratique courante. Ainsi, les probabilités d'incidents et leurs conséquences pour différents indicateurs de dommages (par exemple en termes de décès, de blessures, de dommages matériels, d'interruption de services) et le risque qui en résulte sont estimés quantitativement, en tenant dûment compte des facteurs pertinents du système et de leur interaction.
• Évaluation des risques : L'évaluation des risques est orientée vers la question de l'acceptabilité et la discussion explicite des critères de sécurité. En d'autres termes, l'évaluation des risques doit donner une réponse à la question "Le risque estimé est-il acceptable ? " Pour une évaluation systématique des risques, des critères de sécurité doivent être définis et il faut déterminer si un niveau de risque donné est acceptable ou non. Les critères d'acceptabilité doivent être choisis en fonction du type d'analyse des risques effectuée. Par exemple, des critères adaptés peuvent être définis pour évaluer les résultats d'une analyse de risque à base de scénarios, tandis que des critères exprimés en termes de risque individuel (par exemple, la probabilité de décès par an pour une personne spécifique exposée à un risque) ou de risque sociétal (par exemple, la valeur de l’espérance mathématique de mortalité ou une courbe de référence dans un diagramme FN) peuvent être utilisés pour une analyse de risque systémique. Il existe différentes méthodes d'évaluation des risques : par comparaison relative, par une approche coût-efficacité ou par l'application de critères de risque absolus. Toutefois, dans la pratique, une combinaison de différentes approches est souvent utilisée. Des principes importants pour l'évaluation des risques ainsi que des stratégies d'évaluation des risques utilisables en pratique sont présentés dans le rapport technique 2012 R23 "Pratique actuelle de l’évaluation des risques dans les tunnels routiers”.
• Planification des mesures de sécurité : Si le risque estimé est considéré comme inacceptable, des mesures de sécurité supplémentaires doivent être proposées. L'efficacité (et aussi le rapport coût-efficacité) des mesures supplémentaires peut être déterminée en utilisant l'analyse des risques pour étudier l'impact sur la fréquence ou les conséquences de différents scénarios. La planification de la sécurité doit répondre à la question "Quelles mesures sont les mieux adaptées pour obtenir un système sécurisé (et au rapport coût-efficacité satisfaisant)) ?
L'organigramme simplifié de la figure 1 illustre les principales étapes du processus d'analyse et d’évaluation des risques
Figure 1: Organigramme de la procédure d'analyse et d’évaluation des risques
L'analyse et l’évaluation des risques des tunnels routiers permet une analyse et une évaluation structurée, harmonisée et transparente des risques pour un tunnel spécifique. Elle prend aussi en compte les facteurs d'influence pertinents et leurs interactions. Les modèles d'analyse et d’évaluation des risques permettent une bien meilleure compréhension des processus liés aux risques que les simples concepts basés sur l'expérience. En outre, ils permettent d'évaluer les meilleures mesures de sécurité supplémentaires d'atténuation des risques et de comparer les différentes alternatives. Ainsi, l’analyse et l’évaluation des risques dans le contexte de la gestion de la sécurité des tunnels peuvent être un complément approprié à la mise en œuvre des exigences normatives et des lignes directrices. En pratique, il existe différentes méthodes adaptées à différents types de problèmes. Il est recommandé de sélectionner la meilleure méthode disponible adapté au problème spécifique considéré.
Bien que les modèles de risque s'efforcent d'être aussi proches de la réalité que possible et tentent de prendre en compte des données d’entrée réalistes, il est important de considérer que les modèles ne peuvent jamais rendre compte exactement des événements réels et qu'il existe un certain degré d'incertitude et de flou dans les résultats. Compte tenu de cette incertitude, les résultats de l'analyse quantitative des risques ne doivent être considérés comme précis qu'en ordre de grandeur et doivent être étayés par des études de sensibilité ou assimilées. L'évaluation des risques par comparaison relative (par exemple, d'un état existant avec un état de référence) peut améliorer la robustesse des conclusions tirées, mais il convient de faire preuve de prudence dans la définition du tunnel de référence.
Les principes de base et les éléments importants des méthodologies d'analyse des risques sont présentés dans le rapport technique 2008 R02 " Analyse des risques pour les tunnels routiers». Ce rapport présente également une enquête sur les méthodes utilisées en pratique ainsi qu'un ensemble d'études de cas.
Les différentes approches de l'évaluation des risques sont présentées et examinées dans le rapport 2012 R23 intitulé : "Pratique actuelle de l'évaluation des risques dans les tunnels routiers". Ce rapport comprend également des mises à jour concernant les méthodes d'analyse des risques.
Ces deux rapports présentant les principes fondamentaux de l'évaluation des risques sont complétés par un examen du retour d’expérience pratique en matière d'évaluation des risques, présenté dans le rapport 2016 R35 “Experience with Significant Incidents in Road Tunnels”.
L'interdiction des marchandises dangereuses dans un tunnel n'élimine pas les risques, mais les modifie et les déplace vers un autre endroit, où le risque global peut en fait être plus élevé (marchandises détournées de sorte de traverser une zone urbaine dense par exemple). C'est pourquoi le projet de recherche conjoint OCDE/ACIPR a recommandé que les décisions relatives à l'autorisation/restriction des marchandises dangereuses dans un tunnel soient basées sur une comparaison de diverses alternatives et prennent en compte l'itinéraire du tunnel ainsi que les itinéraires alternatifs possibles.
Un processus de décision rationnel a été proposé, dont la structure est présentée dans la figure ci-dessous. Les premières étapes consistent à produire des indicateurs de risque objectifs, basés sur une analyse quantitative des risques (AQR). Les dernières étapes prennent en compte d’autres données par exemple économiques, ainsi que les préférences politiques du décideur (aversion pour le risque par exemple). Ces dernières étapes pourraient être basées sur un modèle d'aide à la décision (DSM).
Figure 1 : Processus de décision rationnel
Le projet OCDE/AIPCR a développé un modèle d’évaluation du risque ainsi qu'un modèle d'aide à la décision. Le modèle d’évaluation du risque (MD-EQR) est utilisé depuis de nombreuses années dans un certain nombre de pays. Il s'agit d'un modèle systémique d’évaluation du risque et qui produit des indicateurs du risque sociétal (courbes F-N pour les usagers du tunnel et pour la population vivant en permanence à proximité), ainsi que du risque individuel (pour les personnes vivant en permanence à proximité du tunnel). Il est applicable à la fois à un tunnel particulier, aux itinéraires comprenant plusieurs tunnels, et aux itinéraires à l'air libre, de sorte que les risques sur les différents itinéraires alternatifs peuvent être comparés. Le modèle est basé sur 13 scénarios représentatifs de chacune des cinq catégories de tunnels (bien que les catégories D et E ne puissent être distinguées car elles conduisent à des risques similaires). Ce modèle est actuellement mis à jour par l'AIPCR en deux étapes, afin de l'adapter à un environnement matériel et logiciel moderne, puis de l’améliorer sur la base du vaste retour d’expérience de son application. Il peut être acheté auprès de l'AIPCR et est décrit plus en détail sur son site web. Toutefois, il faut souligner que les procédures et les algorithmes de MD-EQR n'ont été développés que pour évaluer les risques dus aux marchandises dangereuses. Par conséquent, ils ne sont pas appropriés à d’autres types d'analyse de risque.
Dans le cadre de la mise en œuvre de la réglementation ADR sur les tunnels, divers pays ont mis au point des procédures spécifiques d'évaluation des risques pour le transport de marchandises dangereuses dans les tunnels routiers, afin d'optimiser les avantages et de réduire au minimum les dépenses liées aux études. Il s'agit généralement d'un processus d'évaluation des risques en plusieurs étapes qui commence par une simple vérification des paramètres, suivie d'une étude du risque intrinsèque du tunnel concernant la circulation des marchandises dangereuses et se terminant par la recherche et l’étude de routes alternatives. L'étude d'évaluation des risques peut être basée sur le MD-EQR, mais dans certains pays, comme par exemple en Allemagne d'autres méthodes sont également utilisées pour certaines étapes (pour plus d'informations, voir le rapport technique 2012R23 " Pratique actuelle de l'évaluation des risques dans les tunnels routiers ", annexe 2)
Des informations supplémentaires ainsi que des exemples d'application sont disponibles dans les rapports AIPCR suivants :
• "Modèle d'évaluation quantitative des risques pour le transport de marchandises dangereuses par les tunnels routiers" dans Routes/Roads 329 (2006)
• Section 4.6 "Modèle EQR OCDE/ACIPR pour les marchandises dangereuses" du rapport 2008R02 et annexe 3.7 "Modèle EQR OCDE/ACIPR pour la DG" du rapport 2008R02.
1. Pourquoi améliorer les tunnels existants ?
2. Méthodologie proposée pour évaluer et améliorer les tunnels existants
Suite aux grandes catastrophes survenues dans les tunnels routiers (incendie du tunnel du Mont Blanc en 1999, incendie du tunnel du Tauern en 1999 ou incendie du tunnel du Gothard en 2001), une attention particulière a été portée aux normes de sécurité des tunnels existants. Les tunnels existants nécessitent des approches et des outils spécifiques pour identifier et évaluer la nécessité de programmes de renforcement de la sécurité. Des recherches et des études substantielles ont suivi ces grands incendies de tunnel, démontrant que de nombreux tunnels routiers existants nécessitent des moyens supplémentaires et spécifiques pour assurer un environnement sûr aux usagers. Même lorsque des programmes d'amélioration antérieurs ont été réalisés, les tunnels existants peuvent ne pas être conformes aux normes de sécurité actuelles en raison de la mise à niveau des réglementations dans l'intervalle.
Ces incidents et les études qui ont suivi ont sensibilisé les personnes impliquées dans les tunnels routiers aux risques liés à ces tunnels, à commencer par les concepteurs et les exploitants jusqu’aux représentants des autorités. Il est devenu évident que le renforcement de la sécurité ne se limite pas à l'amélioration de la structure et/ou des équipements, mais qu'il existe aussi, et parfois surtout, un besoin important de clarifier l'organisation de la gestion de la sécurité et d'adapter les procédures associées.
Lors de l'évaluation de la sécurité dans les tunnels existants, une attention particulière doit être accordée aux changements dans l'environnement du tunnel (volume et composition du trafic, transport de marchandises dangereuses, travaux de construction dans les environs, etc.).
Une approche structurée pour l'évaluation et la préparation des programmes de rénovation est proposée, avec deux tâches principales :
• La première tâche vise à évaluer la situation actuelle du tunnel, comme une image instantanée du tunnel, afin d'identifier le niveau de sécurité actuel. Il faut tout d'abord définir un niveau de sécurité de référence, qui est généralement fourni par le cadre réglementaire. Ensuite, il convient d’analyser les fonctionnalités actuelles du tunnel et l'état des installations qui les assurent. Sur cette base, il faut évaluer si le tunnel existant est actuellement conforme aux critères de conception pertinents pour la sécurité. En outre, les risques spécifiques doivent être évalués par une analyse des risques, qui est un outil approprié pour évaluer le niveau de sécurité actuel d'un tunnel en exploitation. À partir de ces analyses initiales, des actions peuvent être définies et des priorités peuvent être fixées.
• La deuxième tâche vise à définir la situation future du tunnel (après les travaux de rénovation) qui peut être acceptable par rapport à l'objectif de niveau de sécurité défini. Cela peut être fait en élaborant des programmes de rénovation et en évaluant à nouveau le niveau de sécurité du tunnel rénové, en intégrant toutes les mesures de modernisation. Une fois de plus, une analyse des risques peut être réalisée pour démontrer l’atteinte d’un niveau de sécurité adéquat ou pour évaluer diverses alternatives de mesures de modernisation, y compris des critères de rentabilité. Les programmes de rénovation dépendent du contexte spécifique de chaque tunnel, de ses contraintes et de son environnement. Un processus itératif d'analyses des risques peut être conduit sur la base d’un niveau de sécurité projeté qui a été considéré acceptable par toutes les parties prenantes au projet.
Le processus en plusieurs étapes pour la préparation d'un programme de rénovation sur mesure d'un tunnel en exploitation peut être résumé dans l'organigramme ci-dessous. Il décrit les liens fonctionnels entre les différentes étapes et leurs résultats respectifs.
Figure 1 : Organigramme du processus en plusieurs étapes
En détail, le contenu de chaque étape doit être adapté aux conditions spécifiques de chaque tunnel, à son environnement et, bien sûr, aux pratiques locales spécifiques.
En fonction de la situation du tunnel, le processus peut être arrêté après l'étape 3 par une simple comparaison avec l'état de référence si l'analyse démontre que le niveau de sécurité requis est déjà atteint. En effet, pour les tunnels déjà rénovés, l'étape 3 peut être la fin du processus. Dans le cas contraire, l'étape 3 peut mettre en évidence des mesures d'atténuation urgentes qui peuvent être mises en œuvre immédiatement pour améliorer le niveau de sécurité du tunnel par des actions non substantielles telles que des barrières de fermeture, des mesures de signalisation ou de contrôle du trafic. Dans certains cas, ces mesures peuvent être suffisantes pour obtenir le niveau de sécurité requis.
Si des travaux plus importants sont nécessaires, des modifications temporaires des conditions d'exploitation peuvent être un outil utile pour augmenter temporairement le niveau de sécurité du tunnel, si nécessaire.
La préparation des travaux de rénovation d'un tunnel en exploitation est un processus itératif car il s'agit d'une combinaison de questions techniques, de mesures de sécurité, d'implications financières et de contraintes liées à l'échelonnement des travaux. C'est pourquoi les étapes 4 et 5 peuvent être affinées plusieurs fois afin d'obtenir un programme de rénovation adapté tenant compte de tous les paramètres pertinents susceptibles d'influencer la décision. Les tâches de conception peuvent commencer après l'étape 5.
Le rapport 2012R20 "Évaluation et amélioration de la sécurité dans les tunnels routiers existants" fournit des lignes directrices pour chaque étape de ce processus, jusqu'à la définition d'un programme d'amélioration.
Les points faibles (lacunes en matière de sécurité) typiques des tunnels existants sont présentés à l'annexe A du présent rapport. En outre, des études de cas de tunnels existants en Europe démontrent la stratégie adoptée pour les travaux de rénovation et les mesures de modernisation mises en œuvre (Annexe B ).
La collecte et l'analyse des données sur les incidents, comme détaillé au chapitre 3 "Collecte et analyse des données sur les incidents dans les tunnels routiers" du rapport 2009R08, sont essentielles pour l'évaluation des risques d'un tunnel et pour l'amélioration de ses mesures de sécurité. Elles comprennent un processus en deux temps. Il commence au niveau local du tunnel pour couvrir des besoins spécifiques, comme les données d'entrée pour les analyses des risques. Puis il est étendu pour répondre aux obligations légales telles que la communication de statistiques au niveau national/international. L'évaluation d'événements spécifiques (accidents et incidents) peut aider à identifier des dangers spécifiques dans un tunnel ainsi qu'à optimiser les procédures d'exploitation et la réaction des systèmes de sécurité. Outre l'analyse des incidents réels, l'analyse des données issues des exercices de sécurité peut aider à acquérir de l'expérience en matière de gestion des incidents dans des conditions réalistes.
Les questions pratiques de la collecte des données sur les incidents sont traitées plus en détail au chapitre 2 du rapport 2016R35 “Retour d'expérience en matière d'incidents significatifs dans les tunnels routiers”. Il est basé sur les trois étapes fondamentales de la chaîne de collecte des données sur les incidents, à savoir la collecte, la correction et l'interprétation (voir figure 1). Les problèmes pratiques et les limites sont expliqués et des recommandations d'amélioration sont données.
Figure 1 : la chaîne de collecte des données
Il a notamment été noté qu'il peut être très long de collecter toutes les données nécessaires à une évaluation pertinente conduisant à l'amélioration des procédures de sécurité ou pour les statistiques d'incidents utilisées dans l'analyse des risques. Il peut y avoir un conflit entre les ressources disponibles et les ressources requises pour la collecte des données. Il est donc recommandé de définir clairement la chaîne de collecte des données et d'identifier toutes les parties concernées. Toutes les parties prenantes doivent définir leurs objectifs en matière de retour d'expérience, tout en tenant compte des ressources nécessaires ainsi que des difficultés à obtenir et à corriger les données. Sur la base des objectifs et des ressources disponibles, les données requises doivent être clairement identifiées, ainsi que la période pendant laquelle les données doivent être collectées (immédiatement après/pendant l'incident ou à un stade ultérieur) et les parties qui doivent être impliquées dans la collecte des données. Pour que les parties concernées restent motivées, deux actions principales doivent être menées. Tout d'abord, l'objectif de la collecte de données doit leur être clairement expliqué. Deuxièmement, il faut leur faire part des enseignements tirés et des avantages, tels que l'amélioration des procédures et des systèmes.
Les inspections de sécurité, comme expliqué dans le chapitre 4 du rapport technique 2009R08 (Inspections de sécurité des tunnels routiers) sont un outil permettant d'évaluer le niveau de sécurité actuel des tunnels, soit dans un cadre juridique (directive européenne par exemple), soit par rapport à un niveau de risque accepté.
L'AIPCR a développé un schéma organisationnel basé sur la EC Directive 2004/54/EC pour décrire la chaîne de responsabilité en matière de sécurité concernant les inspections de sécurité et pour clarifier les responsabilités des parties concernées. Il propose également le contenu d'une inspection de sécurité (infrastructure et systèmes, documentation de sécurité et procédures existantes, organisation de la gestion des tunnels, formation et assurance qualité) ainsi qu'une feuille de route complète avec toutes les étapes et la préparation nécessaires pour effectuer une inspection de sécurité.
Une route est une infrastructure de circulation linéaire qui est généralement située à l’air libre et parfois dans un environnement fermé comme les tunnels. Il est important d'avoir une approche uniforme de la gestion de la sécurité routière à l'intérieur et à l'extérieur des tunnels. Pour les tunnels, il est nécessaire de prendre en compte des considérations supplémentaires qui nécessitent l'avis d'experts en sécurité et en exploitation des tunnels, y compris des informations provenant de l'exploitant du tunnel, du gestionnaire du tunnel et du centre de contrôle du trafic. Les inspections de sécurité dans les tunnels nécessitent souvent une évaluation plus complexe que sur les routes à l’air libre.
Les zones de transition entre les tunnels et les routes à l’air libre nécessitent une attention particulière en termes d’impact sur la sécurité routière. Les déviations résultant de la fermeture totale ou partielle d'un tunnel en raison de travaux d'entretien ou d'incidents dans le tunnel sont des situations qui peuvent souvent présenter un risque accru. Il est donc tout aussi important d'évaluer ces situations exceptionnelles que l'exploitation normale du tunnel.
Le dossier de sécurité d’un tunnel rassemble pendant toute la durée de vie du tunnel, le relevé de toutes les informations pertinentes pour la sécurité ; il devrait donc être établi pour chaque tunnel dès la phase de conception. Les exigences en matière d'informations sont différentes selon l'étape à laquelle se trouve le tunnel dans son cycle de vie : conception, mise en service ou exploitation.
Au stade de la conception, le dossier de sécurité se concentre sur la description de l'infrastructure du tunnel et les prévisions de trafic, tandis qu'au stade de l'exploitation, les aspects opérationnels, tels que les plans d'intervention d'urgence et les mesures pour le transport des marchandises dangereuses, gagnent en importance. Le degré de détail des informations augmente à mesure que le projet se développe.
Le dossier de sécurité devrait comprendre des documents "vivants" qui sont continuellement développés et mis à jour ; il devrait notamment détailler les modifications apportées à l'infrastructure du tunnel, les données relatives au trafic, etc., ainsi que les enseignements importants tirés du retour d’expérience d’exploitation (c'est-à-dire l'analyse des incidents significatifs, les exercices de sécurité, etc.). De plus amples informations sont disponibles au chapitre 2 "Documentation sur la sécurité des tunnels routiers" du rapport 2009R08.
Pour les tunnels routiers, les exercices de sécurité devraient être considérés comme faisant partie intégrante du processus de planification des mesures d'urgence dans les tunnels. Ces exercices offrent aux exploitants de tunnels routiers une très bonne occasion de tester les procédures d'exploitation et de mettre en évidence les bonnes pratiques et les lacunes, aidant ainsi tous les participants à se préparer à des événements réels. Ainsi, l'évaluation et le compte rendu sont également des éléments essentiels des exercices de sécurité.
Figure 1. Exercice de sécurité dans le tunnel de Talant (France)
Dans de nombreux pays, la réglementation concernant la sécurité des tunnels routiers précise les intervalles de temps entre les exercices de sécurité et donne parfois quelques indications sur le contenu des exercices.
Pour les exploitants de tunnels, l'organisation de tels exercices de sécurité représente une tâche considérable. Il est notamment très important pour les exploitants de tunnels routiers de définir clairement le(s) objectif(s) de chaque exercice et d'adapter son scénario en conséquence.
Le rapport technique 2012R25FR "Bonnes pratiques pour les exercices de sécurité dans les tunnels routiers " , qui s'inspire d'une enquête sur l'expérience internationale actuelle dans ce domaine d'expertise, fournit un guide étape par étape sur la manière de définir les objectifs, de préparer, de réaliser et d'évaluer un exercice de la manière la plus efficace possible. Il comprend également des informations pratiques sur les ressources nécessaires, les coûts et les résultats à atteindre.
Le rapport est utile en tant que liste de contrôle pour aider les responsables de la planification des exercices de sécurité à :
• établir les objectifs de l'exercice
• choisir le type d'exercice le plus approprié pour atteindre ces objectifs
• mettre en place les ressources humaines et techniques nécessaires
• conduire un exercice
• effectuer une analyse après l'exercice
• évaluer le résultat de l'exercice.
Le rapport technique 2008R03 "Gestion de l'interface exploitant – services de secours dans les tunnels routiers développe les exercices de sécurité. Le rapport souligne la nécessité d'une planification d'urgence, d'une familiarisation avec les tunnels, d'exercices périodiques et d'une analyse post-incident.
L’intérêt de rendre les exercices aussi réalistes que possible est généralement mis en avant dans les analyses des incidents après un accident ou incendie et les comptes rendus des exercices de sécurité. Il est également important de s'assurer que les exercices de sécurité restent acceptables en termes de sécurité du personnel, de désagrément pour les usagers du tunnel et d'impact sur les équipements.
Les leçons tirées de plusieurs incidents majeurs ont montré la nécessité de former un partenariat entre les exploitants et les services d'urgence. Les deux parties peuvent se familiariser avec les pratiques par le biais de visites et d'exercices de sécurité.
Les exercices où les exploitants et les services d'urgence s'entraînent ensemble peuvent inclure :
• des exercices sur table sans utiliser des processus opérationnels qui mettent les personnes en alerte. Ces exercices testent la communication, ou fournissent des exercices pour le personnel, ou consistent en des exercices écrits simulant les procédures opérationnelles d'activation et de contrôle
• des exercices partiels qui reposent sur des matériels et du personnel limités afin de tester une partie précise du plan d'urgence pour l’évacuation
• des exercices à grande échelle, qui activent et contrôlent l'ensemble de la planification d'urgence pour un événement grave tel qu'un incendie de poids lourd, ou un incident avec de nombreuses victimes, etc.
Les exercices sur table sont très utiles pour tous les services d'intervention d'urgence. Ce type d'exercices est d'un grand intérêt du point de vue des coûts/bénéfices pour toutes les parties impliquées dans la sécurité des tunnels. Ils peuvent être menés avec succès tout au long de la chaîne d'intervention, depuis les centres d'opération, en passant par les commandants et le personnel d'intervention opérationnel. Les exercices utilisant des programmes de simulation sur ordinateur sont considérés comme utiles et efficaces, et permettent au personnel de s'exercer en mode de réalité virtuelle.
Figure 2. Exercice de sécurité dans le tunnel de Talant (France)
Figure 1: Entraînement des pompiers (tunnel du Mont Blanc)
Dans le cas des tunnels transfrontaliers, il convient d'attirer l'attention sur la collaboration nécessaire entre les pays concernés afin d'assurer une coordination efficace entre les équipes de secours dans les situations de crise.
En ce qui concerne les équipes de secours, les aspects suivants sont soulignés dans le rapport technique 2008R03 "Gestion de l'interface exploitant – services de secours dans les tunnels routiers" :
• les enseignements les plus pertinents tirés des plus graves incendies de tunnel des dernières décennies (chapitre 1 "Enseignements tirés" du rapport 2008R03)
• des informations et des recommandations sur les meilleures pratiques. Celles-ci sont basées sur l'expérience et les enseignements tirés (chapitre 2 "Recommandations détaillées" du rapport 2008R03).
Il est conseillé aux services de secours de s'entraîner régulièrement afin de pouvoir faire face à toute situation pouvant survenir dans les tunnels routiers. Les exercices doivent toujours être conformes aux opérations planifiées à l'avance, basées sur l'analyse et l'évaluation des risques locaux. En plus de ces exercices formels, l'expérience montre qu'il est très important pour les équipes d'urgence d'organiser régulièrement des visites techniques du tunnel, de ses équipements et de ses installations de sécurité.
Le rapport technique 2007R4 "Guide pour l’organisation, le recrutement et la formation du personnel d’exploitation de tunnels routiers" , donne des informations sur les principes généraux de la formation prévue pour une équipe de première intervention. Cette formation doit comprendre les aspects suivants, en tout ou en partie :
• l'organisation et les procédures internes, y compris la connaissance des services et des professions présents dans la structure opérationnelle, les méthodes de travail, les procédures d'enregistrement, les rapports, etc.
• la connaissance du tracé du tunnel et de l'infrastructure associée
• la connaissance de tous les moyens d'accès au tunnel (y compris les moyens d'évacuation)
• la connaissance de l'emplacement de tous les locaux techniques de la structure (par exemple, les armoires de commande des systèmes de sécurité incendie ou de la ventilation).
• la connaissance de l'emplacement et de l'utilisation de toutes les installations de sécurité au sein de la structure
• les moyens disponibles et les possibilités d'intervention du centre de contrôle (moyens de communication avec l'opérateur et leur mode d'utilisation)